La Ciappea : Renaissance de la viticulture en Haute-Roya

Depuis un an au village de La Brigue, dans une vallée de la Roya durement touchée par la tempête Alex, habitantes et habitants se sont réunis pour créer une association, La Ciappea, visant à réhabiliter la viticulture sur leur territoire. Jadis entretenu avec intérêt et amour par les Brigasques, le vignoble était en effet tombé en désuétude depuis les années 1960. Le but de l'association est de créer un vignoble collectif célébrant la viticulture, le patrimoine du village et la joie de vivre ensemble. Le travail important réalisé par La Ciappea en 2021 suscita l’intérêt de Garance Marcantoni, œnologue à la chambre d’agriculture du Var, qui proposa d’aider à l’installation d’un conservatoire de cépages sur une partie du vignoble. Ce conservatoire a pour but de planter et vinifier une gamme de cépages patrimoniaux des Alpes- Maritimes, de la Ligurie et du Piémont, pour mieux sélectionner ceux à même d’offrir un vin de qualité sur nos terroirs des pré-alpes d’Azur. À terme, le but est de permettre un nouveau développement de la viticulture dans la Roya, en montrant quels cépages y poussent bien. Pour se concentrer sur ce projet ambitieux, La Ciappea a mis en place un pôle qui lui est dédié, le Conservatoire des Cépages de la Roya.

Le vignoble restauré et le  conservatoire sont une aventure collective rapprochant les citoyens et citoyennes de la Roya, protégeant le patrimoine naturel des villages, en premier lieu celui de La Brigue où s’ancre actuellement notre initiative et pouvant créer à terme plusieurs emplois. Il s’agit aussi, en redécouvrant des cépages parfois oubliés ou perdus, de célébrer la biodiversité sur le terrain et dans nos verres ! 

Mais écoutez plutôt Garance Marcantoni, oenologue et spécialiste en cépages anciens, présenter le projet de conservatoire en détail!

Voici donc notre projet en vidéo et quelques mots! Si vous souhaitez plus d'informations vous trouvez ci-dessous une description précise de l'histoire de notre projet, son présent et son avenir. 

Bonne lecture, nous vous remercions par avance pour votre soutien !

Virgile Ganne, Luca Casassa et Achille Le Friec pour La Ciappea et le Conservatoire des Cépages de la Roya 

Reprise d'une tradition ancestrale : la viticulture à La Brigue et dans la Roya

1 - Le vin à la Brigue : histoire d’un paysage menacé

Pendant des siècles, trônant face au village dans un halo de lumière, surplombant la Levenza et couronnée par les falaises abruptes du Ciaberta, la vigne fût adorée à La Brigue. Pour la faire prospérer, les brigasques d’antan avaient terrassé un pan entier de montagne, adoucissant les pentes à l’aide de murets aux pierres soigneusement sélectionnées dans le lit de la rivière ou provenant du pic rocheux. Année après année, génération après génération, villageois et villageoises se consacrèrent à entretenir ces murs délicats et solides à la fois, où chaque pierre était choisie pour mieux s’associer au tout permettant d’accueillir les ceps et de faire jaillir le vin. 

Mais aujourd’hui, les murets sont en grande partie effondrés, les terrasses sont envahies de ronces, pins et genets, les ceps ont été arrachés. La terre fertile qui s’était développée dans le vignoble au fil des siècles glisse chaque année un peu plus jusqu’à la rivière qui la vole à la montagne pour l’offrir à la mer. À sa place, les restanques sont ensevelies sous les gravillons infertiles tombés de la falaise. La pente se raidit et le village qui admirait jadis son vignoble craint désormais les éboulements et l’avancée implacable de l’aridité. C’est que la vigne a disparu du village il y a plus de 50 ans : son entretien était devenu trop difficile face à l’exode rurale et la qualité du vin jugée trop faible pour mériter tant de travaux. 

Est cependant resté chez les habitants et habitantes ayant grandis dans les années 50 le souvenir heureux et bucolique de la montagne peinte de vert et d’or, des vendanges en famille, du pressage dans les caves du village et des soirées passées à trinquer entre voisins. Le désir de replanter les terrasses et de redonner vie au vignoble disparu a toujours perduré dans l’esprit de certains. 

2) L’association La Ciappea

C’est au lendemain de la tempête Alex, le 3 octobre 2020, que les membres fondateurs de l’association La Ciappea se sont rencontrés, se serrant les coudes pour nettoyer le village de toute la boue charriée par les pluies diluviennes. La Brigue traversait alors l’une des heures les plus angoissantes de son histoire récente. Mais dans l’épreuve, la proximité et l’entraide donnaient aussi du baume au cœur aux brigasques, leur faisant déceler le potentiel incroyable d’un village aux forces unies. Dans les semaines qui suivirent, l’idée de remettre en état le vignoble local fût lancée et en mars 2021, l’association La Ciappea vit le jour. Le but de l'association est de réhabiliter le lieu dit de La Ciappea pour le remettre en culture de manière collective, chaque adhérente et adhérent pouvant demander de s'occuper d'une restanque ou plus pour y planter de la vigne. Faire renaître le vignoble ensemble, de manière intergénérationnelle, en faisant la part belle à la coopération, à l'art et à la convivialité, a aussi été une manière de rebondir après la tempête Alex. 

S’ensuivit des chantiers de débroussaillage, la mise en place d’une structure administrative pour porter et encadrer la culture, des ateliers de réfection de murets en pierre sèche. Mois après mois, l’association grandit, les adhérents prenant en charge une ou plusieurs restanques dans l’optique d’y replanter de la vigne. En décembre 2021, 21 restanques étaient prises en charge.

Nous lancer dans ce projet fût l’occasion de rencontrer plusieurs professionnels de la vigne. C’est ainsi qu’en juillet 2021 une spécialiste en viticulture biologique travaillant pour la chambre d’agriculture du Var, Garance Marcantoni, nous contacta pour proposer à l’association La Ciappea un projet ambitieux et passionnant : la création d’un conservatoire de cépages patrimoniaux des Alpes-Maritimes. 

3- Le conservatoire des Cépages de la Roya

Garance Marcantoni, que vous pouvez écouter plus haut présenter le projet de conservatoire,  est référente en viticulture biologique et biodynamique dans le Var et fréquente la vallée de la Roya depuis de nombreuses années. Plusieurs fois, passant devant le vignoble abandonné de La Brigue, elle espérait un jour pouvoir participer à sa renaissance. Ainsi, alors qu'elle était montée à La Brigue au mois de juillet 2021 à l'occasion du festival Passeurs d'Humanité et qu'au lieu de voir la broussaille habituelle envahissant les restanques, elle y trouva une dizaine de bénévoles en train de débroussailler, elle n’hésita pas à contacter immédiatement l’association La Ciappea pour proposer ses services et le projet de conservatoire de cépages.

Mais pourquoi vouloir créer un conservatoire de cépages autochtones à La Brigue et lui allouer sept restanques de La Ciappea? 

Si la viticulture a longtemps été pratiquée dans la vallée de la Roya et à La Brigue en particulier, la qualité du vin produit s’est cependant attirée de nombreuses critiques au fil des siècles… En 1807, un inspecteur agricole de l'Empire disait qu’ « il fallait être un robuste habitant des Alpes pour résister à ce vin". Les cépages plantés ont également changé au fil des siècles, passant d’un raisin majoritairement blanc jusqu’au XIXème siècle au raisin framboise au XXème siècle, suite à l’arrivée de nuisibles et de maladies de la vigne comme le phylloxera, l’oïdium et le mildiou. Faire un vin savoureux dans ce terroir montagneur s’avère donc une tâche complexe ; c’est parce qu’il permet de réaliser des test, d’observer et de juger une gamme importante de cépages aux qualités diverses que le projet de conservatoire est si précieux pour le futur du vin brigasque ou de la Roya en général.

En effet, le vignoble de La Brigue se situe à 700 mètres d’altitude et en restanque, ce qui en fait un terroir atypique pour la vigne. Cela demande un processus de sélection de cépage particulièrement large et attentif à la résistance au gel et à la rapidité de maturation du raisin. En plantant au cours des années 2022, 2023 et 2004 vingt cépages différents sur les restanques, il sera possible de réaliser une étude approfondie sur le terrain et en cave de l’adaptabilité des différentes vignes au terroir de la Roya ; dans la liste des cépages, l’on trouve des classiques comme la Négrette de Nice ou la Roussanne, mais aussi des raretés conservées à l’INRAE et qui n’attendent qu’à être replantés, comme le Calitor, le Blancorna ou le Bouteillan Nori. Pour chaque cépage, 40 pieds seront mis en terre afin de disposer d’une quantité suffisante de raisins pour vinifier et juger au fil des années de son goût et des mariages possibles avec d’autres raisins.

À terme et comme son nom l’indique, le Conservatoire des Cépages de la Roya pourrait essayer de développer d’autres lieux d’observation dans la vallée : des villages comme Fontan, Saorge, Tende ou même Breil-sur-Roya ont aussi une histoire agricole fortement liée à la viticulture. Disposant d’expositions et situés à des altitude différentes, ces villages sont susceptibles d’accueillir d'autres cépages qu'à La Brigue, permettant une exploitation plus diversifiée à l’échelle de la Roya. Un jour, osons rêver, grâce au travail de fond que nous souhaitons accomplir via nos deux associations, la vallée de la Roya disposera de sa propre IGP (Indication Géographique Protégée) distinguant une collection de cépages et une qualité viticole unique en son genre! 

4 - Calendrier d’activités 2022-2023

Mais revenons au défi d’aujourd’hui : l’objet de cette campagne de financement participatif est de permettre la poursuite de la rénovation du vignoble de La Ciappea et l’installation du Conservatoire des Cépages de la Roya à La Brigue lors des deux années à venir. 

Le calendrier du conservatoire consiste à planter 8 cépages en avril 2022, soit 400 pieds de vignes, puis 12 autres cépages en 2023 ; pour ce faire, les restanques empruntées sur La Brigue doivent être débroussaillées, déssouchées et labourées tandis que d’importantes portions de murets doivent être refaites suite aux éboulements des décennies passées.

D’ici à avril 2022, d’importants travaux de rénovation ont lieu sur les sept restanques utilisées par le Conservatoire et destinées à accueillir les cépages à planter au printemps puis l'année prochaine. Les cépages de 2023 seront particulièrement précieux car commandés spécialement à l’INRAE et issus de leurs stocks de cépages en voie de disparition. Leur espace d’accueil au conservatoire doit donc être parfaitement préparé pour garantir une mise en terre sans soucis. 

L'association La Ciappea se réjouit d'organiser des moments festifs pour accompagner les efforts consacrés à cette rénovation et de voir toujours plus de terrasses prises en charge par les habitants et habitantes de la vallée de la Roya!

Notre association ayant êté créée en 2021, elle ne dispose pas encore de la trésorerie ou de l’ancrage territoriale lui permettant de financer l'ensemble de ses premières actions. Pour pouvoir commencer dès 2022 à planter les premiers cépages, nous avons besoin de vous! Vos dons iront directement à l'achat de matériel et de plants que les bénévoles de La Ciappea planteront avec passion et rigueur. Dans le détail, nous espérons récolter entre 15 000 et 20 000 euros, somme qui sera répartie de la manière suivante : 

1er palier - 10 000 euros : l’achat de ceps de vigne, de piquets et de fil de fer nécessaires à palisser la vigne, d’outils agricoles, de fertilisant biologique et d’arbres et plantes aromatiques pour la polyculture, de cloture et de système d'arrosage. Au conservatoire, huit cépages seront plantés en 2022, puis douze entre 2023 et 2024. Pour chaque cépage, environ quarante pieds de vigne seront plantés afin de disposer de la quantité nécessaire pour vinifier par la suite. Pour toute l'association La Ciappea, cela représente donc sur trois ans plus de 2000 pieds de vigne, plus de 1 500 piquets, quarante restanques à débroussailler, dessoucher et labourer, des dizaines de portions de murets en pierre à refaire à la main en suivant une méthode traditionnelle.

2ème palier - 15 000 euros : Ces 5 000 euros supplémentaires serviront à payer les prestations de Garance Marcantoni, oenologue, en 2023. Elle accompagnera le Conservatoire des Cépages de la Roya et la plantation de cépages rares conservés à l'INRAE. Garance Marcantoni proposera également des sessions de formation aux membres du réseau de l'association.

3ème palier - 20 000 euros et plus : L'argent obtenu en plus des 15 000 euros initiaux pourra être utilisé afin d'installer un treuil servant à faciliter le transport de matériel agricole (outils, récoltes...) depuis la route du village jusqu'au pied de la falaise, mais aussi à la réalisation d'évènements culturels et pédagogiques.

Par avance, un immense merci pour votre confiance et votre soutien !